Est-ce la fin du business des influenceurs ?

De récents scandales ont dévoilé les pratiques controversées de certains influenceurs sur les réseaux sociaux. L’âge d’or du marketing d’influence est-il révolu ? Analyse.

Au sommaire de ce podcast

• Les influenceurs, entre paillettes et arnaques
• Un coup de balai nécessaire
• Le marketing d’influence, un principe millénaire
• Du jardin d’Eden aux réunions Tupperware
• Alors quel avenir pour les influenceurs ?

La version texte de ce podcast est accessible en bas de cette page. ⬇️

Vous appréciez ce Podcast ?

👌 Partagez-le sur les réseaux sociaux
🤌 Laissez une note sur Spotify
🫶 ou un commentaire sur Apple Podcast !

Dubaï est devenue, en quelque sorte, la « Gotham City » de l’influence, avec son lot de personnes peu recommandables et de pratiques controversées.

Les influenceurs, entre paillettes et arnaques

Sale temps pour les influenceurs…

Ces derniers mois, plusieurs affaires ont mis en avant le côté obscur du monde doré des « créateurs de contenus ».

Un duel oppose notamment depuis plusieurs mois l’agent d’influenceurs Magali Berdah et le rappeur Booba. Le chanteur s’étant engagé dans une lutte pour dénoncer les arnaques dans le milieu des influenceurs.

D’autres scandales ont également éclaté du côté de Dubaï. Une ville devenue, en quelque sorte, la « Gotham City » de l’influence, avec son lot de personnes peu recommandables et de pratiques controversées.

En septembre 2022, c’est le magazine « Complément d’enquête » de France 2 qui a jeté un pavé dans la mare avec son numéro spécial : « Arnaques, fric et politique : le vrai business des influenceurs« .

Côté pile, on voit un univers de paillettes, de voitures de sport et de bling-bling. Le tout sur fond de buildings ultra-modernes, de plages de sables fins et de palmiers.

Mais côté face, c’est une image bien moins glamour…

Avec des influenceurs sans scrupule qui mèneraient grand train à l’abri de la fiscalité française, tout en proposant aux internautes des produits trop chers ou qu’ils n’utilisent pas eux-mêmes.

Pas joli joli tout cela…

L’image désastreuse donnée par cette émission sur le monde de l’influence n’a pas manqué de faire réagir les internautes sur Twitter.

Comme le montre de ce tweet de Visibrain publié peu après la diffusion du magazine de France 2 :

Avec son numéro consacré aux influenceurs, #ComplementDenquete fait le buzz sur Twitter : 241 852 messages publiés en 24h, dont 17 000 rien que sur le mot « tendinite », employé par #MagaliBerdah. Ce numéro génère ainsi 34 fois plus de tweets que le précédent sur l’inflation 📺 pic.twitter.com/LxfGqXnRrS

— Visibrain (@visibrain) September 12, 2022

Le hashtag #ComplementDenquete a ainsi généré plus de 450.000 messages, dont 70.000 sur le mot #tendinite.

De quoi sonner le glas des influenceurs ?

Pour aller plus loin : Qui sont les 7 influenceurs qui comptent plus de 300M de followers sur Instagram

Un coup de balai nécessaire

Le marketing d’influence est un accord tacite entre 3 acteurs consentants :

• Les marques, qui veulent vendre leurs produits
• Les influenceurs, qui les présentent à leur communauté
• Les internautes, qui acceptent d’être exposés à ces campagnes

Et après tout, si chacun y trouve son compte, c’est très bien ainsi.

Mais après avoir visionné les pratiques dénoncées par le reportage, on est en droit de se demander : qui est vraiment gagnant ?

• Le consommateur, qui achète des produits trop chers ou inutiles ?
• Les marques, qui deviennent dépendantes des créateurs de contenus, en vendant leurs produits sans créer de lien direct avec le public ?
• Les influenceurs, qui gagnent plusieurs milliers d’euros chaque mois sans créer de réelle valeur ajoutée ?

Je vous laisse deviner la réponse.

L’influence n’est pas une pratique qui est apparue avec YouTube, TikTok ou Instagram. C’est un principe vieux de plusieurs millénaires.

Le marketing d’influence, un principe millénaire

Si un peu de ménage est certainement nécessaire, le marketing d’influence a néanmoins de beaux jours devant lui.

Voici pourquoi.

L’influence n’est pas une pratique qui est apparue avec YouTube, TikTok ou Instagram.

C’est un principe vieux de plusieurs millénaires.

Pour preuve, le texte le plus ancien qui en parle est très certainement un passage de la Bible.

On le trouve dans le livre de la Genèse, dans le récit entre Eve et le serpent dans le jardin d’Eden.

Dans cette histoire, le serpent va essayer de « vendre » une pomme à Eve.

Et voici sa méthode :

« Le serpent était le plus rusé de tous les animaux sauvages que l’Éternel Dieu avait faits.
Il dit à la femme: « Dieu a-t-il vraiment dit: ‘Vous ne mangerez aucun des fruits des arbres du jardin’? »
La femme répondit au serpent: « Nous mangeons du fruit des arbres du jardin. Cependant, en ce qui concerne le fruit de l’arbre qui est au milieu du jardin, Dieu a dit: ‘Vous n’en mangerez pas et vous n’y toucherez pas, sinon vous mourrez.’ »
Le serpent dit alors à la femme: « Vous ne mourrez absolument pas, mais Dieu sait que, le jour où vous en mangerez, vos yeux s’ouvriront et vous serez comme Dieu: vous connaîtrez le bien et le mal. »
La femme vit que l’arbre était porteur de fruits bons à manger, agréable à regarder et précieux pour ouvrir l’intelligence. Elle prit de son fruit et en mangea. »

La Bible, Genèse 3 (Traduction Segond 21).

On voit ici clairement que le serpent a utilisé les techniques de l’influence pour convaincre Eve « d’acheter » sa proposition de manger la pomme.

Il ne lui impose rien. Il lui fait juste miroiter les soi-disants avantages et bienfaits de son « produit » (la pomme).

Eve, incrédule et séduite par une si belle promesse, se laisse tenter et mord finalement le fruit défendu.

Une méthode diablement efficace…

Pour aller plus loin : A partir de combien d’abonnés est-on un influenceur ?

Du jardin d’Eden aux réunions Tupperware

L’influence est donc un principe ancien et élémentaire du marketing.

Il se base également sur le principe de la recommandation entre individus. Et c’est ce qui en fait toute sa force.

Pour une marque, utiliser le marketing d’influence lui permet ainsi de toucher un consommateur d’une façon plus authentique que via une simple publicité.

En effet, c’est une personne qui conseille un produit à une autre personne. Et non une marque qui parle à un consommateur.

C’est une méthode redoutable, qui a fait le succès des réunions Tupperware au siècle dernier.

Le schéma était simple : une femme au foyer invitait ses amies chez elle pour leur faire une démonstration de boites de rangement de la marque Tupperware dans un cadre agréable et convivial.

Résultat : un coup de génie marketing et des ventes qui ont explosé.

Car la force de recommandation d’une amie est bien plus importante qu’une campagne publicitaire.

Aujourd’hui, ce concept existe toujours. Il a été décliné par d’autres marques comme le fabriquant de petit électroménager Thermomix.

Thermomix France réunit ainsi une équipe de 8.300 conseillères, qui organisent 420.000 réunions chaque année.

Pourquoi ce concept de vente est-il toujours efficace à l’ère des smartphones et des réseaux sociaux ?

Car il se base sur la recommandation et l’influence. Un cocktail imparable pour booster des ventes, même au 21ème siècle.

Pour aller plus loin : Comment travailler efficacement avec des influenceurs ? Les conseils de Camille Jourdain, expert en influence marketing

Alors quel avenir pour les influenceurs ?

La mauvaise presse qui entoure les influenceurs depuis plusieurs mois devrait avoir pour conséquence de remettre un peu d’ordre dans un monde où certaines pratiques commerciales étaient devenues plus que contestables.

Plusieurs initiatives ont vu le jour. Comme celle du Ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, qui a lancé en janvier 2023 une consultation publique pour créer un code de bonne conduite afin d’assainir cette activité et dénoncer les pratiques frauduleuses.

Les influenceurs doivent informer leur communauté quand ils sont rémunérés pour faire la promotion de produits.
Luttons ensemble contre les publicités déguisées. Signalez ces comportements trompeurs sur https://t.co/orHLa3bwPO.@alaingriset @dgccrf https://t.co/1SF9t3NOaw

— Bruno Le Maire (@BrunoLeMaire) July 28, 2021

En janvier 2023, plusieurs acteurs du secteur de l’influence (agences d’influence, agences de créateurs de contenu, créateurs de contenu…) se sont regroupés pour fonder l’UMICC : l’Union des Métiers de l’Influence et des Créateurs de Contenu.

Parmi ses missions, l’organisme souhaite participer au développement d’une influence plus responsable afin de protéger les consommateurs et proposer les évolutions et réformes nécessaires aux pouvoirs publics afin que le secteur de l’influence bénéficie d’un cadre adapté à son développement.

Autre acteur engagé dans cette croisade contre les influenceurs peu éthiques, le Collectif AVI – Collectif d’Aide aux Victimes d’Influenceurs, qui a interpellé directement Meta France sur Twitter concernant leur inaction dans le domaine :

👋🏽 Bonjour @MetaFrance, quelles mesures allez-vous prendre envers les influenceurs francophones qui proposent illégalement à leurs abonnés des conseils financiers et font la promotion d’investissements boursiers à très haut risque sur vos plateformes ?#marcblata #influvoleurs

— Collectif AVI (@collectifAVMN) January 24, 2023

Meta a ainsi supprimé plusieurs comptes problématiques suite à cet échange. Dont ceux de Marc et Nadé Blata et de Laurent Correia, tous ex-candidats dans des émissions de télé-réalité.

Malgré cet environnement morose, le marketing d’influence a encore un avenir radieux devant lui.

A condition toutefois d’utiliser ces techniques commerciales :

• Pour proposer de vrais produits,
• Vendus au juste prix,
• A des consommateurs qui en ont vraiment besoin.

C’est également aux marques de reprendre la main sur leurs collaborations et partenariats influenceurs afin de créer une vraie relation avec les consommateurs et les créateurs de contenus, grâce à un marketing plus éthique et responsable.

Pour aller plus loin : 3 étapes pour bâtir une stratégie de Marketing d’influence efficace